THAT DEMON WITHIN

 

Pays de production : Hong-Kong
Année de production : 2014
Durée : 111
Genre : thriller,action
Réalisateur : Dante Lam
Scénario : Dante Lam, Jack Ng
Cast : Daniel Wu, Nick Cheung, Andy On

L’Avis du NIFFF :

De garde dans un hôpital, le policier Dave Wong sauve sans le savoir le chef d'un groupe de criminels violents. Rongé par la culpabilité, il se met en tête d'arrêter le malfrat tout en essayant de faire face aux démons du passé. Avec ce puissant polar urbain, Dante Lam explore la bestialité humaine. Renforcé par une esthétique sidérante et l'imposante musique de Leon Ko, la noirceur du récit prend rapidement la forme d'un uppercut qui vous laissera K.O.

L’Avis du BIFFF :

Protégé de Gordon Chan, Dante Lam s’est vite taillé une place de luxe dans le thriller HK, réalisant notamment The Viral Factor et Unbeatable. Cette fois, il combine sa maîtrise époustouflante des scènes d’action avec une atmosphère noire et tendue, transcendant ce simple thriller en quête métaphysique du bien et du mal à la sauce taoïste ! Et c’est Daniel Wu (Chinese Zodiac, Europa Report) qui est chargé de faire la leçon à Nick Cheung (Election) dans un affrontement visuellement bluffant de bout en bout !

Mon humble avis :

En 2001, l’acteur Daniel Wu et le réalisateur Dante Lam avaient déjà travaillé ensemble un polar, « Hit Team », dont ils n’étaient pas satisfaits, et qui s’est bien planté au box office.
Après être devenu un spécialiste du polar noir (en écho à la rétrocession de Hong Kong à la Chine, en 1997), Dante Lam a du se reconvertir, faire même des « bouses » comiques pour toutes sortes de studios, avant de tomber au plus bas, suite à la fameuse anecdote Edison Chen :
Cet acteur très côté ayant eu des photos de ses ébats sexuels avec des starlettes diffusées sur le web, suite à la réparation de son portable, le scandale médiatique en ayant résulté avait à l’époque obligé Dante Lam à remonter son film « Snipers », dont Edison tenait la vedette, pour transformer sa présence en rôle secondaire, condamnant ainsi la logique scénaristique du métrage, et par conséquent l’amenant à encore se planter au box-office !
Mais ici, le duo Daniel Wu / Dante Lam se reforme, pour revenir à un polar sombre, et c’est enfin le renouveau de ce bon réalisateur, jamais aussi à l’aise que dans le genre.

Le message est qu’on a tous le mal en nous, et le scénario semble montrer qu’il peut même se transmettre (comme une contamination par le sang), en tous cas presque tous les protagonistes du métrage sont bien pourris, et des tueurs en puissance…

La réalisation du film est riche, avec une grammaire cinématographique très large, qui use d’effets de style vertigineux.
Elle mélange les codes du polar avec ceux du drame psychologique (la psychose de son anti-héros), en offrant d’incroyables scènes d’action, dans une ambiance horrifique digne d’un giallo italien.

Les cadrages en mouvement sont fait à l’épaule, ce qui donne une certaine fièvre dans les scènes de suspens.
Ils usent d’arrières plans flous, d’hyper gros plan (sur les yeux par exemple), il n’y a jamais de dialogues en simple champ / contre-champ.

La photographie établit une ambiance globalement jaune-verte, avec des pointes rouge sang (justement les couleurs de la mort dans le giallo), le tout avec des contrastes forts, et des éclairages au top du professionnalisme.

Le montage est speed d’entrée de jeu, alternant les gros plans et les plans larges pour un effet maximum, alternant les couleurs les plus extrêmes, ou fusionnant parfois les plans en fondus enchaînés.

Les décors urbains montre le bordel régnant dans un Hong Kong décrépi, aux HLM misérables.
On y voit un hôpital, des ruelles, un commissariat, des échangeurs routiers, des échafaudages en bambou… et un lieu sur lequel je me suis personnellement rendu, le « Celestial treasure », seul lieu à Hong Kong où sont fabriqués les statuettes mortuaires en papier : ce détail m’a plu, c’est toujours plaisant de retrouver dans un film un lieu où on est passé physiquement, surtout si ce lieu exotique est en plus mystérieux et « creepy » !

Les costumes sont juste réalistes, rien à signaler, à part que Daniel Wu ressemble presque à Rain man, lorsqu’il est en civil.

Les effets spéciaux sont bien foutus, d’entrée on a droit à un générique de début où se mêlent fumée et éclairs, dans un rendu très arty.
Puis, ce sont surtout des impacts de balles numériques, du feu en synthèse, ou une explosion au ralenti très impressionnante (avec un corps humain en combustion).
C’est aussi des SFX qui jouent avec l’image, déjà bourrée d’effets photos, de cadrages originaux, et de montage audacieux, par exemple ça rajoute encore des filtres rouges, lorsque le personnage perd pied, et sombre dans la violence, ça fait flotter des particules dans le décor durant l’hypnose, ou ça déforme les perspectives, pour accentuer les scènes d’action.
L’accident de voiture final est carrément WAOWW !!!
Je ne trouve pas d’autre mot, pour décrire cette cascade, bourrée d’effets pyrotechniques, rehaussés en synthèse, qui nous vaut un « car stunt choregrapher » au générique.

Le casting est véritablement impérial, pour jouer son bon samaritain autiste, Daniel Wu, quand à lui, n’a pas hésité à perdre plus de 10 kilos pour le rôle, devenant ainsi émacié à souhait, et a été isolé de sa famille et de ses proches pendant des semaines, pour mieux rentrer dans son personnage.
Comme d’habitude il est habité par son rôle, qu’il interprète complètement à fond, avec une puissance intériorisée.
Nick Cheung est génial aussi en vilain dur à cuire, et tous les seconds rôles ont les gueules de l’emploi (et même des tronches pas possibles en ce qui concerne le gang des voleurs de diamants).

La musique est originale, elle mélange des instruments traditionnels chinois avec du saxophone typé polar, et des percussions hyper puissantes, ce qui nous donne au final une sorte de « jazz démoniaque », aux mélodies de film d’épouvante !
On y entend aussi des voix bien flippantes, à faire dresser les cheveux sur la tête, des airs de piano typiques des films de possession, et du violoncelle dans des notes très très graves.
C’est ce que j’ai entendu de mieux au cours du NIFFF 2014.

En conclusion, « That demon within » est un excellent néo-polar, dont certes le scénario ne révolutionne pas le genre, mais dont l’interprétation et la mise en scène sont d’une telle qualité, et d’une telle intensité, qu’on ne peut pas rater l’évènement.