WHITE GOD

 

Réalisateur(s) : Kornel Mundruczo
Producteur(s) : Viktoria Petranyi
Scénariste(s) : Kata Weber, Viktoria Petranyi, Mundruczo Kornel
Photographie : Marcell Rev
Montage : David Jancso
Musique : Asher Goldschmidt
Interprète(s) : Zsofia Psotta, Sandor Zsoter, Lili Monori, Luke and Body
Pays : Hongrie, Allemagne, Suède
Année : 2014
Durée : 1h59

L’avis du FEFFS :

Un père contraint sa fille à abandonner son chien, Hagen, dans les rues de Budapest. Très vite, les pérégrinations aventureuses de Hagen se transforment en une odyssée de cruauté humaine quasi insoutenable.
White God est un film qui surprend. Ce qui démarre comme un mélodrame sur un chien livré à lui-même vire soudain au conte hallucinant mettant en scène un véritable héros épique canin et ses congénères doués de télépathie. Si Mundruczo en profite pour donner quelques coups de griffe aux rêves extrémistes de pureté ethnique, la beauté lumineuse et la résonance mythique du film lui confèrent une dimension bien plus ample, l’élevant au rang de puissante parabole sur les rapports de pouvoir, l’oppression et la liberté, délivrée par les chiens sans doute les plus attachants jamais filmés.
 

Mon Humble Avis :

Gagnant de la compétition internationale du FEFFS 2014, ce film mérite-t-il autant d’éloges ?
C’est ce que nous allons essayer de déterminer, en l’analysant point par point, selon notre méthode habituelle…

Le message du film traite de la cruauté des hommes vis-à-vis des animaux, en cherchant à ce que le public se mette à la place de ses pauvres chiens errants, et en nous présentant en détails l’univers cruel des combats de chiens.

La réalisation est moderne et sérieuse à la fois, elle obtient un mélange entre l’aspect documentaire animalier romancé, du style « L’Ours » de jean Jacques Annaud, et une peinture sociale sans concession de la Hongrie.

Les cadrages emploient beaucoup de plans larges, des caméras mobiles, et des vues subjectives du point de vue des chiens.
Lors des poursuites, la steadycam devient de la shaky-cam, c’est trop secoué !
Une scène où le chien est battu est filmée en utilisant le hors champ, avec un cadrage sur la chaîne tremblant sous les coups.
Il y a un plan sensationnel de la meute fonçant vers la caméra, en passant à travers une flaque d’eau, le chaos à l’état brut !
Le plan final (que je ne spoilerai pas) est sensationnel lui aussi…

La photographie est naturaliste, avec des tons tristes, bruns-gris.
Il y a des belles ombres, souvent les silhouettes des chiens se découpent sur le fond en ombres chinoises.
Un plan a du être difficile à éclairer : celui du chien courant sur la route de nuit, seul lui est éclairé, le reste est dans le noir, alors que la caméra le précède dans sa course, beau défi technique.
Par contre, les effets stroboscopiques dans la boîte de nuit sont un peu soûlants car trop longs.

Le montage est calme, voire assez lent, suivant le rythme naturel de l’action, mais le film est globalement un poil trop long quand même…

Les décors présentent des rues désertes, des terrains vagues, des parcs, un abattoir, l’appartement du père de l’héroïne, et la maison de l’organisateur de combats de chien.
Les plans larges insistent sur les belles architectures d’une grande ville, il y a même une scène donnant à voir un panorama complet de la ville.

Rien à signaler au sujet des costumes, réalistes et sobres.

Les effets spéciaux de maquillage traditionnel concernent des arrachages de gorges, une écorchure au genou, et quelques cadavres baignant dans leur sang !
Quelques impacts de balles sont par contre réalisés en synthèse plutôt ringarde.
On espère que les blessures des chiens sont simulées par des maquillages, ce que le générique nous assure.
Mais de toute façon, le plus gore de tout le film est sans conteste la scène se déroulant à l’abattoir, où, sans aucun SFX, des ovins sont dépecés en gros plans ne nous épargnant aucun détails !

Tout le casting est impeccable (humains comme animaux) : la gamine est attachante et sobre, et l’acteur jouant le père au début antipathique rend son personnage émouvant à la longue.
Malheureusement toutes les relations humains dans ce scénario sont dures, du coup le film devient sec et austère à la longue.
Bien sûr, on y voit de très bons chiens dressés, deux pour chaque rôle (de façon à ce qu’ils se remplacent dés que l’un a marre du tournage).

La musique emploie de l’orgue sombre et grave, c’est des mélodies tragiques ou d’action avec un ample orchestre symphonique, il y a beaucoup de cordes et de percussions, avec en plus un léger son électronique, renforçant le suspens.
On entend aussi de la trompette en son diégétique (puisque jouée par l’héroïne), ainsi que tout un orchestre (où elle répète).
Dans la boîte, c’est des chansons de style pop-rock, électro, ou industriel.

En conclusion, le film est déjà bien plus musical qu’on peut s’y attendre, avec cette description inattendue du milieu des concertistes, ce qui lui ajoute un intérêt certain.
Tout le film est en fait un flashback pour rejoindre sa sidérante scène d’intro, et au-delà, la dernière partie du film est un peu plus faible, mais la scène finale vaut tellement le coup que ce léger défaut est vite oublié.
Je ne dirais pas que « White God » est un chef d’œuvre, mais il est clair qu’il a de grandes qualités, il est déjà très émouvant, fait réfléchir, et est superbement mis en musique.
Il méritait donc bien de gagner cette édition du FEFFS.