SLOW WEST


catégorie : Films of the 3rd kind
pays de production : UK
année de production : 2015
durée : 84’
genre : thriller,western,action
réalisateur : John Maclean
scénario : John Maclean
cast : Michael Fassbender / Ben Mendelsohn / Rory McCann

Synopsis

Au 19ème, le jeune Jay traverse les grandes plaines américaines à la recherche de son amour perdu. La route est possiblement mortelle. Un western hypnotique au final poignant.

Mon humble avis

Un western néo-Zélandais va-t-il apporter un regard neuf sur le genre ?
Déjà, son histoire est inhabituelle dans le genre, il ne s’agit pas d’une vengeance, ou de la recherche d’un magot, mais juste pour un jeune colon de traverser le pays pour retrouver celle qu’il aime.
Le message du film semble être « ne fais confiance à personne », tout en nous présentant cet « oisillon hors du nid », et en rappelant que survivre ne suffit pas, qu’on ne peut vivre totalement sans amour.
La réalisation insiste sur une description précise des mœurs brutales de l’époque, mais avec un humour noir bien senti.

On a donc bien un regard décalé sur le genre western, avec ce jeune candide, aussi intellectuel que romantique et naïf, qui traverse ce pays sauvage où règne la violence la plus déshumanisée.
Les cadrages utilisent souvent des avants plans (des branches par exemple).
C’est filmé au 1/85, ce qui est un format inhabituel dans le western où on trouve plus couramment du 16/9 en cinémascope, ça nous rapproche des personnages, malgré leur isolement dans ses grands espaces.

Certains plans sont construits avec un découpage contrasté de la lumière, comme par exemple dans un canyon où l’arrière plan est très lumineux, et le premier plan carrément en ombres chinoises.
Il y a aussi des gros plans extrêmes, comme cette contre-plongée vue du dessous d’un champignon !
Il y a finalement moins de plans larges que ce qu’on trouve traditionnellement dans le genre, le style visuel rompant donc aussi avec nos habitudes, tout comme la narration.
La photographie est en lumière naturelle, mais avec un détourage soigné, dans un camaïeu ocre et vert-jaune.
Forcément, elle est moins lisible dans les quelques scènes nocturnes.
Le montage est tranquille, voire lent (d’où le titre ?), à l’image de ces deux cow-boys en pyjamas, dont les chevaux avancent au pas, reliés par une corde à linge où sèchent leurs vêtements !

Les décors naturels sont grandioses, on y trouve plus de flore (notamment de fleurs) que d’habitude dans le genre (moins de sable et de cailloux !).
On voit donc de belles forêts, des plaines, des montagnes, des rivières, et juste ce qu’il faut de désert.
Les costumes nous montrent une reconstitution réaliste, ils sont choisis dans les tons de la photo (brun-ocre et vert-jaune donc).
Il y a peu d’effets spéciaux dans ce film, quelques effets d’impacts de tirs (souvent le gore est hors-champ).
Notons un cadavre rigolo : le squelette d’un bûcheron écrasé par son arbre !
Un autre SFX bien géré est celui de la flèche en pleine tête stoppée avec la main.

Globalement l’action est sèche et sans fioritures, réaliste, comme dans le célèbre « Impitoyable » de Clint Eastwood.
Le jeune acteur Kodi Smit-McPhee a un physique androgyne d’une douceur absolue, tandis que Fassbender incarne à merveille ce dur à cuire, loin de ses rôles habituels.
Ce sont bien là deux total anti-héros, finalement complètement nuls, même le soi-disant balaise, ce qui change quand même beaucoup pour un western.
Les seconds rôles sont savoureux, nous offrant une belle galerie de tronches caractéristiques de l’époque.
Leurs dialogues savoureux font souvent mouche.

La musique mélange des guitares country avec des violons irlandais, distribuant quelques balades romantiques dans les moments de voyage sans dialogues.
Il y a parfois des mélodies cycliques qui évoquent le travail minimaliste de Michael Nyman en musique baroque répétitive pour les films de Peter Greenaway.
En conclusion, on rit beaucoup dans ce métrage iconoclaste, avec cet humour à froid fonctionnant sur le décalage des situations (souvent des morts violentes ridicules).
Ce jeu de massacre a finalement un style qui ressemble assez à celui des frères Cohen (« Fargo », Un plan simple »), souhaitons à ce réalisateur la même carrière.