SHIELD OF STRAW


Pays de production : Japan
Année de production : 2013
Durée : 125
Genre : thriller,action
Réalisateur : Takashi Miike
Scénario : Tamio Hayashi
Cast : Nanako Matsushima, Takao Osawa, Tatsuya Fujiwara

L’avis du NIFFF

En proposant dans les journaux une récompense d’un milliard de yens, Ninagawa espère retrouver l’assassin de sa petite-fille. Le fugitif, alors poursuivi par une horde de chasseurs de prime, tente de se frayer un chemin jusqu’à Tokyo. En lice pour la Palme d’Or au dernier festival de Cannes, Shield of Straw a déjà conquis son public. Fascinant et déroutant, ce western urbain du génie fou Takashi Miike vous entraîne dans une course-poursuite infernale à vous couper le souffle !

Mon humble avis

Sans doute produit avec une participation de la police japonaise (d’où le nombre de véhicules, d’uniformes, et le message assez facho), ce film de commande est assez éloigné de l’univers habituel du réalisateur Takashi Miike dans le fond, mais pas dans la forme…
En effet, le message traite de l’absurdité du système judiciaire qui défend des criminels récidivistes (ici un violeur assassin pédophile, sans aucun remords), dépensant inutilement l’argent des impôts, là où il aurait été plus simple et rapide de privilégier une exécution sommaire.
Car le héros a des principes, son devoir passe avant tout, il protège le sale type et il est incorruptible, mais le réalisateur ne prend pas son parti, puisque le scénario montre constamment à quel point il a tort.

Plus subtilement qu’avec un Dirty Harry, le film suggère donc que le pays se porterait mieux avec une police constituée de Robocop / Judge Dredd.
C’est assez étonnant de voir ça de la part d’un anarchiste comme Miike, considéré comme un cinéaste violent, déjanté et provocateur (CF des films comme « Audition », « Visitor Q », « Ichi the Killer » ou « Gozu » pour s’en convaincre !), mais l’homme est pétri de contradictions, et c’est peut être de montrer un homme de principes, confronté au chaos, qui l’a intéressé dans ce sujet.
Sa réalisation reste académique, on est loin des excès expérimentaux d’un « Dead or Alive » par exemple.
Pour les cadrages, on trouve beaucoup de gros plans sur les expressions intenses des acteurs, et des plans fixes sur pieds, parfois construits, parfois trop simples…

Il n’y a pas trop d’inventions ou d’idées originales.
On trouve aussi des cadres trop serrés sur les cascades automobiles, pour tenter vainement de camoufler leur faible vitesse.
Ça donne l’impression que Miike se sent obligé de toujours faire des trucs foireux, même dans les produits les plus calibrés !
La photographie est lumineuse et nette, c’est très pro, comme on peut s’attendre sur une si grosse production, mais c’est finalement trop « propre » pour un sujet si sombre.

Le rythme du montage est variable, en fonction de l’action, mais toujours un poil trop lent, car les scènes sont allongées au maximum…
L’ensemble aurait mérité un coup de ciseau supplémentaire pour aller à l’essentiel.
Quelques séquences sont plus tendues et réussies, mais le film est globalement trop long.
Comme décors urbains, on va de Fukuoka à Tokyo, par la route et le rail, avec une débauche de figuration policière impressionnante.
Il y a de nombreux plans en hélicoptère, montrant les sites de haut, ou de grue pour des mouvements stylés de caméra au cours de l’action, c’est du gros calibre !

Rien à signaler question costumes, ils sont réalistes et très sages pour du Miike.
Comme effets spéciaux, on a droit à quelques blessures et impacts, une explosion de camion en images de synthèse, totalement « bigger than life », et sûrement réalisée que pour faire de l’effet dans le trailer, si exagérée que Michael Bay ne l’aurait pas reniée !
Sinon, il n’y a pas grand chose d’autre comme SFX…

Au sein de ce casting quatre étoiles, tous sont excellents, intenses, sans être excessifs, poussant leurs rôles jusqu’à l’extrême.
Les deux stars principales, Takao Osawa (« Sky High » et « Aragami » de Ryûhei Kitamura, « Goemon » de Kazuaki Kiriya) et Tatsuya Fujiwara (principalement connu pour avoir interprété le rôle principal des films « Battle Royale » de Kinji Fukasaku, et « Death note » de Shūskue Kaneko), sont impeccables dans leurs rôles de flic intransigeant et de psychopathe irrécupérable.
Les acteurs secondaires sont tous bien aussi, du coup on se dit que Miike est forcément un bon directeur d’acteur.
Il y a trop peu de musique, et elle n’est pas mémorable, on trouve vraiment de trop grands moments sans accompagnement sonore, avec des dialogues ou pire de longs silences…

Heureusement que les acteurs sont bons, sinon tout ce « château de cartes » s’écroulerait bien vite.
C’est donc dommage que Miike ne soit toujours pas capable de filmer correctement une scène d’action (seule celle du train sort du lot), le film aurait été meilleur avec un montage plus serré et un « action director » pour chorégraphier quelques séquences, comme dans un polar de Hong-Kong, mais sur le plan humain les comédiens sont suffisamment intéressant pour passer quand même un bon moment.