Note d’intention

 

Laurent GONEL, scénariste-réalisateur.

 

Une conversation avec mon paternel suite à la lecture d’un livre sur l’histoire de l’anarchisme m’a amené à m’interroger sur la notion d’héroïsme.

Les vrais héros en temps de guerre ne sont-ils pas ceux qui se sont dressés contre l’appel aux armes, et ont refusé de se battre et ce quelles que soient les conséquences pour eux-mêmes ?… fusillés par leurs pairs, puis oubliés par les manuels d’histoire, ces héros pacifistes mériteraient qu’on leur érige un monument aux morts, comme ceux qu’on trouve dans toutes les communes en temps de paix, mais qui ne sont finalement que des odes à la guerre, puisqu’ils n’offrent un devoir de mémoire que vis-à-vis de ceux qui se sont battus.

A mon humble niveau de cinéaste amateur, je veux créer avec ce court métrage un monument à la gloire des déserteurs de toutes les guerres, passées, présentes et futures !

Je ne prétend pas connaître ce genre cinématographique, qu’est le “ film de guerre ”, assez précisément pour affirmer que cela n’a jamais été fait, mais ce qui est sûr c’est que ce ne sera jamais assez fait, donc quitte à dépenser du temps et de l’énergie sur un film, autant que ce soit pour un message qui mérite vraiment d’être relayé davantage.

Rien ne mérite de tuer un autre homme, aucune cause politique ou économique ne pourrait justifier le fait qu’une minorité d’hommes gouvernant des peuples entiers puissent décider pour eux qu’ils doivent entrer en guerre les uns contre les autres.

En temps de paix, tuer un autre homme est un meurtre puni par la loi, en temps de guerre tuer devient tout à coup un acte héroïque, et refuser de tuer devient alors une trahison punie par la loi, c’est absurde.

Nos codes de morale et d’éthique sont bien élastiques alors que les raisons profondes justifiant soi-disant des guerres dépendent toujours du coté où l’on se trouve.

Tout homme devrait avoir la liberté de décider qu’une guerre ne le concerne pas, malheureusement pour défendre cette utopie de nombreux anarchistes pacifiques ont été tués car la justice dans notre société humaine ne défend finalement que les intérêts des puissants qui la modèlent.

 

Dans un premier temps de ma réflexion, je souhaitais faire une reconstitution historique située durant la seconde guerre mondiale, puis à force de rencontrer des problèmes de véracité au cours de l’écriture, j’ai finalement totalement “ changé mon fusil d’épaule ” pour opter pour cette uchronie de guerre imaginaire entre deux armées d’amazones.

En effet, cette solution de science fiction permet d’élargir le débat, d’en faire un conte philosophique, tout en évitant l’écueil consistant à porter un jugement sur des actes réels appartenant au passé.

Celui qui n’a jamais connu réellement une guerre peut difficilement savoir comment il réagirai lui-même dans de telles circonstances, aussi inscrire notre récit imaginaire dans un vrai contexte historique me parait finalement prétentieux, et déplacé vis-à-vis de ceux qui ont vraiment vécu ces tristes événements.

C’est donc pour éviter de manquer de respect aux survivants de guerres réelles que j’ai préféré en inventer une, cela permet aussi de contourner tous les problèmes de réalisme et de crédibilité que pose un tel sujet.

L’uchronie est un procédé aussi vieux que la science fiction elle-même.


L'uchronie est un genre littéraire qui repose sur le principe de la réécriture de l’Histoire à partir de la modification d’un événement du passé. On utilise également l’expression histoire alternative, directement traduite de l’expression anglo-saxonne alternate history.

Les histoires de mondes parallèles sont très proches du principe d’uchonie.

Notre uchronie consiste donc à une inversion des valeurs entre les sexes : on se retrouve donc dans un monde parallèle où les femmes font la guerre tandis que les hommes restent à la maison pour élever les enfants !

Cette simple inversion des rôles donne une toute autre saveur au script initial…

Cela renforce le message du film en insistant sur l’absurdité de toute guerre, puisqu’on imagine tellement difficilement une armée uniquement constituée de femmes que les mots pour la décrire n’existent même pas : en effet, en Français, pas de féminin pour les mots “ soldat ”, “ officier ”, “ envahisseur ”, “ dictateur ” ou même “ déserteur ”…

C’est donc aussi un moyen de briser des stéréotypes et de proposer au moins du jamais vu, plutôt qu’un film de guerre de plus, ce qui avec des moyens d’amateurs n’apporterait pas grand-chose.

Avec cet aspect iconoclaste, au contraire, notre film devient un brûlot satirique plein d’humour noir, au lieu du pamphlet pompeux et donneur de leçon qu’il risquait d’être sans.

Cela crée une distanciation avec le réel qui confère au projet la possibilité d’être plus léger, autant dans les situations proposées que dans les dialogues.

On peut désormais y “ aller à fond ”, même dans l’exubérance de la mise en scène, et se faire vraiment plaisir en termes de spectaculaire, autant dans les scènes d’action que dans celles de tortures, sans avoir peur de trop en faire par rapport au “ sérieux ” du sujet.


“ Armé ” de ce nouveau point de vue, j’ai pu enfin terminer l’écriture de ce scénario, avec beaucoup plus d’enthousiasme et d’optimisme (quand à la faisabilité du projet).

Enfin, après de nombreux essais, l’idée de réaliser le film en live fut abandonnée, au profit d’un film en animation de poupées Barbie.

Les poupées au moins elles seraient toujours prêtes, elles ne se plaindront jamais du froid, ou des cascades, elles patienteront des heures en silence entre les prises ! :)

Le projet prit alors une toute autre tournure, construction de décors miniatures, achats d’accessoires à l’échelle 1/6ième, couture des mini-uniformes, installation de marionnettiste, etc…

Ce fut au final un tel plaisir, que cette formule sera dorénavant la mienne, pour la plupart de mes futurs films.

 

Je dois ici tirer ma révérence à mon Consultant technique : Thierry, surnommé Titi, un type extra, passionné de reconstitution historique, qui m’aida tout au long du projet : échange d’idée et de point de vue pour l’écriture, documentation sur le matériel pour la construction des accessoires, tests en live, cessions de bruitages avec du "véritable" équipement militaire, puis conseils lors du montage.

Encore merci à toi, cher ami, et pour rendre hommage à ta passion pour l’histoire, rien de tel que ton nom dans notre générique, en l’honneur d’un des rares “ soldat ” méritant d’être connu ! :)

L'uchronie au Cinéma :

  • 2009 : Lost Memories : un assassinat commis en 1909 change le cours de l’histoire : 100 ans plus tard, la Corée est restée japonaise…
  • L’Effet papillon : un jeune homme manipule le passé, mais réalise très vite que les conséquences sont imprévisibles…
  • Jean-Philippe : et si Johnny Hallyday n’avait pas pu assister une de ses premières auditions et était resté inconnu du grand public…
  • Pile & face : et si Helen était montée dans le métro ? Elle y aurait rencontré un charmant jeune homme, plein d’esprit : James. En arrivant chez elle, elle aurait surpris son fiancé au lit avec une femme. Elle aurait aussitôt rompu, et pris un nouveau départ dans sa vie … Et si Helen avait raté le métro ? Elle aurait été agressée dans la rue par un voleur à la tire, et serait rentrée chez elle pour se faire réconforter par son fiancé, alors que celui-ci sortait à peine des bras de sa maîtresse. Et la vie aurait continué…
  • Fréquence interdite : John Sullivan (Jim Caviezel), inspecteur de police, est toujours hanté par la mort de son père, pompier, survenue lors d’un spectaculaire incendie en 1969. Par une nuit illuminée d’aurore boréale et d'éclairs magnétiques, John met en marche une ancienne radio et croit entendre la voix d’un homme. Bouleversé, il reconnaît son père. Par-delà la mort et le temps, les deux hommes se parlent. Mais tout miracle a un prix et l’enchaînement des événements va s’en trouver modifié. Face à l'étrange vague de meurtres qui se déclenche, père et fils vont se battre, chacun dans sa dimension.

 

  • Un jour sans fin : de Harold Ramis, avec Bill Murray. Journaliste météo à la télévision, Phil Connors part comme chaque année à Punxsutawney faire son reportage sur le "Groundhog Day" ("Jour de la marmotte"). Une tempête l'empêchant de quitter la ville, il se voit contraint d'y passer une nuit de plus. Le lendemain, il constate que tout se déroule exactement comme la veille et qu'il est condamné à revivre indéfiniment cette journée du 2 février... Film qui sur-exploite de façon comique la notion de "point de divergence". Coincé dans ce 2 février, le héros en explore toutes les possibilités, jusqu'à (presque) en maîtriser tout le déroulement.
  • Nimitz, retour vers l'enfer, (Final Countdown en version originale). Le porte-avions nucléaire USS Nimitz en manœuvres dans le Pacifique traverse un orage rond, une sorte de tempête électromagnétique, qui le propulse dans le temps à la veille de l’attaque japonaise sur Pearl Harbor. Fort d’une technologie en avance de 40 ans et de la connaissance des événements à venir, le pacha Mat Yelland (Kirk Douglas) et son bras droit, le capitaine de l’aéronavale Richard T. Owens (James Farentino), décident d’intervenir. Seul un civil David Lasky (Martin Sheen) du département de la défense, embarqué à bord comme simple observateur sur ordre du mystérieux M. Tideman, les met en garde contre toute modification de l’Histoire qui pourrait avoir des conséquences dramatiques et imprévisibles…
  • Le film 1984 de Michael Radford offre un exemple très intéressant d’uchronie. Le roman dont il est adapté, écrit par George Orwell en 1949, est une œuvre d'anticipation imaginant comment serait le monde quelque 35 ans plus tard: un univers totalitaire. Mais le film ne peut être classé dans la catégorie "anticipation", car il a justement été tourné en 1984, année où l’action est censée se dérouler. Il met en scène une dictature similaire à celle évoquée dans le roman, ce qui fait de ce film une uchronie imaginant comment serait le monde des années 1980 si des régimes totalitaires étaient parvenus à le contrôler entièrement.
  • La trilogie Retour vers le futur de Robert Zemeckis met en scène des uchronies multiples en prenant pour postulat l’invention d’une machine à voyager dans le temps. Les points de divergences apparaissent à des moments et des situations clés de la famille McFly (la rencontre des parents, la mise à l'écart de l’ennemi de la famille) et plus précisément du héros (sa capacité de décision dans les moments critiques et face à un élément provocateur). La force des uchronies présentes dans cette saga n’est pas basée sur de grands faits historiques, mais sur les événements relatifs à une famille durant des époques marquantes (industriellement et culturellement), qui sont des tournants pour notre société actuelle, ce qui a sans doute laissé un plus grand champ de créativité pour l’auteur (notamment lors de dialogues mémorables, comportant des anachronismes non volontaires, faisant le pont entre une éducation moderne et un modèle de vie ancien) et ainsi une meilleure expression de son ouverture d’esprit, moteur de l’uchronie… On peut parler de première trilogie cinématographique uchronique.
  • Déjà Vu : Doug Carlin (Denzel Washington) agent de l’ATF enquête sur l’explosion d’une bombe sur un ferry à la Nouvelle-Orléans. Il est alors recruté par une "unité de recherche spéciale" où il découvre que le gouvernement dispose de la capacité d’observer les événements qui se sont déroulés 4 jours et demi auparavant. En cherchant à s’envoyer un message de mise en garde à lui-même, il interfère dans le cours de l’Histoire… À noter une nouvelle fois la présence de Jim Caviezel (Fréquence interdite) dans une histoire de voyage temporel.
  • Monsieur Destinée  : Le personnage principal (James Belushi) se plaint de sa vie sans goût et réfléchit au moment de sa jeunesse qui a marqué un tournant décisif dans sa vie : il aurait pu devenir un grand champion de base-ball si un jour il n’avait pas cligné des yeux au mauvais moment et ainsi loupé la balle. Un soir, dans un bar perdu, un étrange barman lui offre de revenir en arrière et de réussir cette fois sa passe de balle... ce qui modifiera sa carrière et sa vie.
  • Punishment Park  : Film (tourné sous la forme d’un documentaire) américain de Peter Watkins, sorti en 1971, ou il développe les conséquences possibles d’une déclaration d’état d’urgence par le président des États-Unis pendant la guerre du Viêt Nam qui n’a, dans la réalité, jamais été décrétée. Le film met en scène de jeunes militants des droits civiques, féministes, objecteurs de conscience, communistes et anarchistes qui doivent, s’ils ne veulent pas être mis en prison, franchir un désert sur 85 km sans eau ni provisions tout en étant poursuivis par un escadron de policiers armés qui n’auront pour seul but que de les neutraliser, définitivement.
  • Jin-Roh, la Brigade des Loups : Film d'animation japonais de Hiroyuki Okiura (1998). L'histoire se déroule dans un Tokyo des années 1950 troublé par des mouvements sociaux. Bien que rien ne l'indique explicitement, de nombreux éléments permettent de déduire du contexte que l'Allemagne nazie a remporté la Seconde Guerre mondiale puis a occupé le Japon : le héros fait partie d'une unité de maintien de l'ordre nommée "PANZER", la Volkswagen Coccinelle est devenue le véhicule de référence, le Gouvernement opère une politique de répression accrue en s'appuyant sur des brigades policières aux armes et uniformes d'inspiration allemande, les livres sont publiés en allemand...
  • La vie est belle (film, 1946) : réalisé par Frank Capra, ce film raconte la vie d'un homme bon qui un jour est victime de la malchance et fait faillite. Désespéré, il tente alors de se suicider en se jetant du haut d'un pont. Mais une autre personne le fait avant lui. C'est en réalité un ange envoyé sur terre pour le sauver. Il va alors lui montrer ce qu'aurait été sa ville s'il n'avait pas existé et toutes les répercussions qu'on eu de petites actions de sa vie.

L'uchronie dans les Séries télévisées :


  • Sliders : au cours de chaque épisode, un groupe passe de Terre parallèle en Terre parallèle; dans chacune, un élément de l’histoire a changé : l’URSS a conquis le monde, les États-Unis sont une monarchie, etc.
  • Sept jours pour agir : un astronaute ("chrononaute") américain revient sept jours en arrière grâce à une caspule temporelle pour régler tous les soucis de son gouvernement.
  • Code Quantum : dans un avenir proche, Sam Beckett, génial physicien, explore le temps malgré lui en prenant la place de différents protagonistes. Il répare les erreurs du passé avec l’aide de son ami holographique Al Calavicci et d’un ordinateur caractériel Ziggy. Sam Beckett se retrouve ainsi à croiser des personnages comme Michael Jackson à qui il apprend le moonwalk, Stephen King, et même dans la peau d'Elvis Presley ou de Lee Harvey Oswald…
  • Demain à la une : Gary Hobson reçoit tous les jours le journal du lendemain. Héros malgré lui, il aide les habitants de Chicago à se sortir de tous les mauvais pas en modifiant leur présent (le passé du journal). Un concept à rapprocher du film Un jour sans fin (Groundhog Day) avec Bill Murray : Phil Connors, présentateur télé au caractère exécrable, se retrouve coincé (géographiquement et temporellement) à Punxsutawney le jour de la fête de la marmotte… Condamné à vivre cette journée indéfiniment, il se rend compte que sa mission est d’aider les gens au lieu de se lamenter sur son sort.

 

  • Doctor Who : Cette série relate les aventures du Docteur, un extraterrestre, un seigneur du temps originaire de la planète Gallifrey, qui voyage à bord d’un TARDIS (Time and Relative Dimensions In Space), une machine pouvant voyager dans l’espace et dans le temps.

Filmographie Nazixploitation

 

Par ses scènes gores de torture, notre film peut aussi être rapproché d’un sous-genre du film de guerre, le film de “ nazixploitation ”. En effet, il existe tout un pan (honteux pour certains “ bien pensants coincés du cul ”) de l’histoire du cinéma qui se délecta avec un voyeurisme malsain des exactions nazis de la seconde guerre mondiale (cf filmo plus bas).


Le choix de l’uchronie nous permet encore d’éviter cette étiquette réductrice, tout en ne se privant pas de ses effets racoleurs (fétichisme de l’uniforme, complaisance pour la violence graphique, etc…), dont nous abuserons avec une “ insouciance calculée ” !

“ Ilsa la louve des SS ” (alias “ Le ss était là, les Gretchen aussi ”) 1975 Don Edmonds.

 

“ Camp spécial n°7 ” 1973 Robert Lee Frost.

 

“ Salo ou les 120 journées de Sodome ” 1975 Pier Paolo Pasolini.

 

“ Salon Kitty ” 1976 Tinto Brass.

 

“ Portier de nuit ” 1974 Liliana Cavani.

 

“ SS Girls, la maison privée des SS ” (alias “ Hôtel du plair pour SS ”, alias “ Perversions du IIIième Reich ”) 1977 Bruno Mattei.

 

“ KZ9 camp d’extermination ” 1977 Bruno Mattei.

“ SS camp 5 : l’enfer des femmes ” (alias “ Roses rouges pour le Führer ”) 1981 Sergio Garrone.

 

“ Horreurs nazies ” 1981 Sergio Garrone.

 

“ Nazi Love Camp 27 ” (alias “ Destin de femme ”) 1977 Mario Caiano.

 

“ Les nuits chaudes de la Gestapo ” 1978 Fabio De Agostini.

 

“ Les Déportées de la section spéciale SS ” 1976 Rino Di Silvestro.

 

“ Holocauste nazi ” (alias “ Armes secrètes du IIIième Reich ”) 1977 Paolo Solvay.

 

“ Des filles pour le bourreau ” (alias “ Bourreaux SS ”, alias “ La dernière orgie du IIIième Reich ”) 1977 Cesare Canevari.