DISCOPATHE

 

Réalisateur(s) : Renaud Gauthier
Producteur(s) : Renaud Gauthier, Marie-Claire Lalonde
Scénariste(s) : Renaud Gauthier
Photographie : John Londono
Montage : Arthur Villers
Musique : Bruce Cameron
Interprète(s) : Catherine Antaki, François Aubin, Sandrine Bisson
Pays : Canada
Année : 2013
Durée : 1h21

L’avis du FEFFS :

Dans les années 1970, un jeune new-yorkais sans histoire se métamorphose en meurtrier dès qu'il est exposé aux sonorités particulières d’une toute nouvelle musique : le disco. Incapable de contenir ses pulsions meurtrières provenant d’un traumatisme d’enfance, Duane Lewis deviendra malgré lui un dangereux tueur en série en exil à Montréal.
" Slash Dance " serait un bon qualificatif pour ce slasher rétro qui a su capter authentiquement l’ambiance urbaine des années 1970, grâce une superbe photographie qui reproduit les nuances de couleur d’époque, rappelant l’esthétique des giallos et du cinéma d’exploitation.

Mon Humble Avis :

On est en droit de se demander si le film a été vendu au producteur sur le jeu de mot de son titre, puis son scénario écrit ensuite !
Mais, selon le réalisateur, venu présenter son film au FEFFS 2014, il n’en est rien, puisqu’il s’agit vraiment d’un projet mûri de longue date, et concocté avec amour en quasi auto-production.

Il n’y a pas de message à proprement parler dans ce film oldschool, simple produit grindhouse pour le fun (film d’exploitation comme on disait alors).
Le « héros » a un gros problème, suite à un traumatisme, la musique le rend violent, il ne supporte donc pas les lieux où l’on danse par exemple… ceux qui me connaissent un peu peuvent sans doute comprendre pourquoi je me suis intéressé à ce métrage !!!

La réalisation est classique, c’est celle d’un slasher vue souvent du point de vue du tueur.
Le film traite d’une psychose décalée avec un certain onirisme, qui lui vaut ses meilleurs moments de mise en scène.
Mais l’ensemble est tout de même d’une qualité assez inégale.

Les cadrages usent d’une grammaire académique donc, mais avec parfois des ralentis stylés (dont un plan sur la culotte du cadavre d’une jeune étudiante, interprétée par la fille du réalisateur quand même) !
Il y a des vues subjectives du tueur lors de certains meurtres qui évoquent le Giallo.
Un autre meurtre est cadré au travers de l’ouverture d’une porte, permettant à notre imagination de compléter le hors champ, procédé devenu trop rare.
Un plan très impressionnant a été réalisé sur rails avec une plateforme tournante, pour faire tourner le décor tout autour de la sœur lorsqu’elle réalise l’ampleur des dégâts, belle performance technique agréable à l’œil.

La photographie est colorée et lumineuse, les tons sont chauds même dans les scènes nocturnes.
Un meurtre est filmé sous un effet stroboscopique, qui évoque carrément les origines du cinéma, avec ces photos de mouvements décomposés regardées au travers des fentes d’un cylindre tournant !

Le montage utilise des ellipses, des scènes clippées, il est finalement assez « arty », mais son rythme est tout de même assez tranquille, il y a même des longueurs.
Les conversations sont montées en simple champ / contre-champ, classique.

Les décors sont d’abord situés à New York à la fin des années 70, on y voit un dinner, le parc, une boîte de nuit, l’aéroport, puis après ce premier tiers (le meilleur), ça passe à Montréal.
Là on trouve une école religieuse de jeunes filles, et la planque crado du héros.

Les costumes sont réalistes (donc parfois ringards vu la mode de l’époque) !

Les effets spéciaux montrent plus de gore qu’on pourrait s’y attendre de prime abord, à l’arme blanche principalement (couteau, morceaux de disque vinyle), pour des meurtres à la mise en scène très abouties (le premier surtout est digne d’un vieux Dario Argento).
Après, dans les 2/3 à Montréal, le film se perd un peu dans les méandres du torture porn, avec sa scène interminable et déplacée où le héros « jouent » avec les têtes de ses victimes, arrosant de sang la prof qu’il a kidnappée…
Le cadavre au crâne littéralement explosé après un chute du haut d’un building est exagérément gore, non pas que ce n’est pas réaliste, mais c’est étalé (c’est le cas de le dire) avec une gratuité voyeuriste inutile.

Le casting est inégal, le héros a bien une intensité prenante au début, mais il finit par être caricatural (c’est plus la faute du scénario que de l’interprétation, quoiqu’il termine par des grimaces trop appuyées).
Après le premier tiers en anglais, si le film perd en pureté, il gagne forcément en humour involontaire avec l’incomparable accent québécois !
Les acteurs interprétant les flics sont moyens, et il y a beaucoup trop de séquences de « remplissage » avec eux (comme dans un Kaïju japonais entre les scènes de monstres géants).

La musique est d’emblée du disco qui déménage, le titre phare de la bande originale étant un petit bijou.
La bande son devient un personnage à part entière, et il faut féliciter le travail du mixage son, vraiment bluffant (surtout encore une fois dans la première partie).
La musique entre les tubes disco (comme « Stop ou encore » de Plastic Bertrand) compose une sorte de suspens psychédélique, mi Capenter mi Goblin, parfaitement adapté.

En conclusion, on se croirait revenu dans les années 80 avec ce film indépendant sympathique, l’humble œuvre d’un réalisateur aimant vraiment le genre.
Dommage, on n’est pas passé loin d’un film culte, mais il aurait fallu coller plus à son thème de départ tout du long, ne pas vouloir trop en mettre au risque de perdre sa pureté thématique d’origine : le scénario aurait du, à mon humble avis encore une fois, se focaliser davantage sur la musique et sa relation conflictuelle dans la psyché du héros…
Le film aurait du rester davantage de son point de vue, et dans un visuel disco plus appuyé.
Au final, même si on peut, comme moi, sortir un peu déçu, il n’en reste pas moins un agréable métrage pour les amateurs du genre slasher, bien sanglant de surcroît.