PHANTOM BOY


Réalisateur(s) : Alain Gagnol, Jean-Loup Felicioli
Producteur(s) : Jacques-Rémy Girerd
Photographie : Nancy Bens, David Bols, Sarah Manheere, Pascal Vermeersch
Voix : Audrey Tautou, Jean-Pierre Marielle, Edouard Baer
Pays : Belgique, France
Année : 2015
Durée : 1h24

Synopsis :

À New York, un mystérieux homme défiguré blesse Alex, un inspecteur de police lancé à ses trousses.
Immobilisé à l’hôpital, Alex fait la rencontre de Léo, un garçon de onze ans qui possède la faculté de sortir de son corps.
Comme un fantôme, invisible de tous, il s’envole et passe à travers les murs.
Le gangster défiguré menace la ville avec un virus informatique.
Grâce aux pouvoirs extraordinaires de l’enfant, Alex reprend son enquête.

L’avis du FEFFS :

Phantom Boy est la dernière réalisation des créateurs d’Une Vie de chat.
Mélange de polar et de fantastique, l’intrigue se déroule entre les gratte-ciels de Manhattan.
Avec un travail d’animation essentiellement réalisé à la main, le trait du dessin conserve sa fragilité et sa sensibilité, offrant un film à la fois plein de suspense et de poésie.

Mon humble avis :

Lors du FEFFS 2015 la projection de « Phantom boy » fut précédée de la remise des prix du concours de dessins d’enfants (affichés sur place et projetés en salle), 6 gagnants se sont vus remettre des sacoches de matériel de dessin, pour avoir eu leur image de fantôme sélectionnée par le jury.
Cette fois le réalisateur d’Une vie de chat a voulu mélanger polar et fantastique.
J’ai noté deux étranges références dans les dialogues, d’abord à Gremlins (coïncidence au FEFFS 2015 où Joe Dante est présent !), puis à Apocalypse Now (inattendu dans un film pour enfants), preuves de la cinéphilie avertie du réalisateur.

Le message du film tourne autour des qualités morales du héros, faisant don de soi pour aider les autres.
Malgré un méchant terroriste de comics assez stéréotypé, le film est très original en traitant du voyage astral (suite à un coma).
Le voyage astral est une expression de l'ésotérisme qui désigne l'impression que l'esprit se dissocie du corps physique pour vivre une existence autonome et explorer librement l'espace environnant.
Il existe plusieurs synonymes de cette expression incluant « décorporation », « dédoublement astral », « excursion psychique », « expérience hors du corps » (EHC),« projection astrale », « projection du corps astral », « sortie hors du corps » (SHC), « transe ecsomatique », « voyage hors du corps », et « sortie astrale ».
L'expression d'expérience de hors-corps est plus récente et relève davantage de la médecine et la psychologie.
L'expression est liée à la croyance des occultistes en un corps astral et en un plan astral.
L'expérience se produirait en diverses occasions : à l'approche de la mort, au cours d'une opération sous anesthésie, sous le coup d'une douleur intense, au cours d'une méditation, lorsque le corps est dans un état de relaxation avancé, lors du sommeil profond, sous l'emprise de drogues hallucinogènes, en période de stress, lors de paralysie du sommeil où même sans aucune raison directe et à tout moment.
Il n'existe pas de preuve acceptée par la communauté scientifique quant à la possibilité d'un « voyage astral » mais ce concept est utilisé dans certaines œuvres de science-fiction ou fantastiques ou dans des « fictions ésotériques » (comme dans les ouvrages de Lobsang Rampa, ou ceux d'Anne Givaudan et Daniel Meurois).
Dans le dessin animé, le jeune héros tombe dans le coma, et développe ce don surnaturel.
Il est ensuite capable d’aider les autres patients à qui cela arrive, et qui ne le comprenne pas, alors que ces derniers ne se souviennent de rien une fois réveillés, notre héros lui s’en rappelle et parvient même à contrôler efficacement son pouvoir pour aider le flic dans son enquête…

Le corps astral est le nom donné dans le cadre de l'occultisme à l'un des sept corps dont les êtres humains sont constitués, superposé notamment au corps physique et au corps éthérique.
Son nom vient de ce qu'il se compose de forces et de substances empruntées au plan astral.
Il dispose d'organes suprasensibles nommés différemment selon les traditions ésotériques, comme les fleurs de lotus ou chakras.
Parmi les êtres vivant sur Terre, seuls les humains et les animaux en possèdent un.
Uniquement perceptible grâce à la vision clairvoyante ou troisième œil, il entoure les êtres vivants et est animé d'une sorte d'aura parcourue de courants colorés et lumineux qui reflète leur état psychique.
Les occultistes appellent cordon d'argent ou corde d'argent un lien subtil qui rattacherait le corps physique à un corps invisible (appelé « corps éthérique » ou parfois « corps astral »), un peu comme le cordon ombilical rattache le fœtus au placenta.
Ce cordon serait lui-même invisible... sauf à des médiums, à des voyants, ou à des rescapés de la mort.
Ce serait en raison de sa nature luminescente, voire fluorescente électrique, qu'il est comparé à un éclat argenté, et nommé assez communément « cordon d'argent ».
Dans le dessin animé, le corps astral du héros ne semble pas relié à son corps physique dans les plans où il s’en extrait, cependant, dans les plans aériens où il vole au dessus de la mégapole, il laisse bien une sorte de traînée derrière lui, qui peut s’apparenter au cordon d’argent.
De plus, le policier semble bien avoir lui aussi une « vision astrale », puisqu’il est le seul à le voir et à l’entendre sous sa forme « spectrale »…

Le réalisateur emploie beaucoup d’humour, soit dans les dialogues, à l’intention des adultes, soit sous forme visuelle (comme des chutes) pour amuser les plus petits.
La mise en scène doit d’abord jongler entre deux histoires parallèles, que le scénario parvient vite à mêler habilement : d’un côté un polar simplifié réduit à ses stéréotypes, et de l’autre une trame surnaturelle entre exploit de super-héros en culottes courtes et fantastique gothique.

Les cadrages usent d’une bonne variété de valeurs de plans, avec aussi quelques panoramiques sur les décors.

La photographie privilégie les à-plats de couleurs chaudes, avec des ombres grises ou brunes.

Le montage est tranquille, mais quelques scènes d’action sont plus nerveuses.

Les décors lissent voir la texture du papier, ce qui donne un léger grain sur les arrières plans, contrairement aux éléments peints en sur cellullos et animés.
On a ainsi un New York old-school très coloré, qui rappelle le Gotham city de la série Batman de Bruce Timm, avec ces immeubles en silhouettes où se découpent juste des rectangles jaunes en guise de fenêtres.
Tout cela n’est pas du tout moderne, ça fait plutôt années 50 (alors qu’il est question de virus sur internet et de téléphones portables, ou qu’un portait du président Obama est affiché à l’hôtel de ville) !

Le design des personnages est stylisé à l’extrême, très minimaliste.
Il s’agit d’un dessin tout en rondeurs, évoquant Tom-Tom & Nana dans les « J’aime lire ».
Ils ont tous les yeux trop haut sur le front, et inclinés, en amande, ils ont de tout petits pieds pointus, et des corps souples et mous (ce qui est évidemment encore amplifié sous forme d’esprit éthéral flottant dans les airs).
Le méchant a un look de super vilain de Batman, avec son visage cousu de différentes teintes de peau, et son costume de film noir (imper et chapeau), c’est un peu Leatherface chez Dick Tracy !

L’animation ressemble à du flash en plus fluide, avec des ombres tremblotantes caractéristiques des techniques traditionnelles, et offrant un beau relief aux personnages.
Il n’y a aucun effet spécial numérique, tout est fait en animation à la main, même la superposition du fantôme réintégrant son corps, l’eau ou le feu (exemples mêmes de ce qui se fait communément en synthèse aujourd’hui).

Le casting du doublage est plutôt prestigieux : on retrouve Edouard Baer en flic un peu décalé, Jean-Pierre Marielle impeccable en méchant à la voix grave, Audrey Tautou en journaliste au caractère bien trempé, et Jackie Berroyer dans le rôle de la « Taupe », un indic gouailleur.
Ils sont tous parfaits.

La musique jazzy convient au contexte, mais on y trouve malheureusement aucun thème dominant, plutôt juste une sorte de « suspens planant »…

En conclusion, l’émotion dans ce film naît du caractère altruiste du héros, une qualité suffisamment rare pour en faire un beau spectacle pour toute la famille.